Mon engagement dans la profession

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Mon engagement dans la profession

Discours tenu le 15 juin 2019, lors de l’Assemblée Générale de la CPIC, en vue de présenter ma candidature à l’élection en qualité de membre au Conseil de fondation de la CPIC.

Lieu : ISIT International, Paris, France

Monsieur le Président,

Chers (ères) membres du Conseil de Fondation,

Madame la Directrice,

Chers(ères) bénéficiaires,

Chers (ères) collègues,

Je me présente aujourd’hui devant vous afin d’exposer mes motivations à présenter ma candidature à l’élection en qualité de membre au Conseil de Fondation de la CPIC.

Permettez-moi d’abord de me présenter.

Je m’appelle Stefka Ivanova, interprète de conférence diplômée indépendante, membre actif de l’AIIC, accréditée auprès des Institutions de l’UE, cabine bulgare et retouriste vers le français, à l’initiative et à la tête du réseau des interprètes de conférence diplômés de Bulgarie issus des écoles d’interprétation de conférence reconnues par la DG SCIC.

Les motivations qui me poussent à intégrer la CPIC sont au nombre de trois. Je les déclinerai en trois mots-clés :

-Identité professionnelle,

-Résponsabilité,

-Partage.

Trois mots-clés interdépendants.

Identité professionnelle d’abord.

Le socle de valeurs autour desquelles l’interprète se construit prend racine dans les valeurs de nos pères fondateurs de l’AIIC. Ce socle de valeurs a forgé notre identité et ce faisant a affirmé notre place dans la société en nous faisant appartenir à une profession avec ses règles et normes, avec des conditions de travail et une rémunération dignes. C’est à travers cette identité professionnelle que s’est écrite notre histoire et qu’aujourd’hui nous cueillions encore et toujours les fruits de notre rôle, devenu incontournable dans un monde interculturel, multilingue, en perpetuel changement. C’est aussi à travers cette identité professionnelle que nous nous sommes organisés en structures, parmi lesquelles la CPIC – un projet ô combien visionnaire en 1970 ! Assurer une prévoyance stable et sûre pour un métier libre mais de caractère souvent instable. Voilà une équation difficile à résoudre – enfin résolue ! Et nous ne pouvons que nous incliner devant un tel acquis, nous, les indépendants!

Cette identité et ce qui en découle est un acquis sans nul pareil que nous prenons parfois comme un acquis. Or, il ne faut jamais oublier que rien n’est acquis ! Surtout aujourd’hui, où une tendance, visible maintenant depuis plus d’une décennie, à l’éclatement de cette identité commence à se frayer un chemin rythmée, entre autres, par une réalité socio-économique, politique, financière et numérique folle et impévisible. A travers ma candidature, c’est le maintien de cet héritage, ces valeurs et par là, notre identité, que je me propose de préserver.

Or préserver appelle à la responsabilité.

Responsabilité.

Il n’y a pas d’identité professionnelle sans responsabilité. Comme il ne peut y avoir de prévoyance sans responsabilité.

Pourquoi ?

Tout d’abord, parce que la profession m’a donné la liberté de faire le choix d’être interprète indépendante et le luxe d’avoir un plan de prévoyance sur-mesure CPIC. Avoir cette liberté où « cela rentre tout seul, même lorsque cela ne rentre pas » suppose donc que je reçois.  Si je reçois, c’est parce que VOUS me donnez, JE ME DOIS donc DE VOUS DONNER et pas seulement en mettant une pièce dans le pot commun.

Deuxièmement, parce qu’il y a de nombreux défis très incertains devant la profession à relever – notamment ceux liés à l’entrée incidieuse mais glorieusement progressive du numérique dans la profession. Les conclusions de la rencontre entre les Universités et les 3 DG de l’Interprétation de conférence auprès des Institutions européennes des 4 et 5 avril derniers à Bruxelles tendent à le montrer même si le message que nous retenons est :« L’interprète ne sera pas remplacé par la machine ! ».

Même si je souhaite y croire, je dois me préparer et nous devons nous préparer. Je vise ici peut-être plutôt les collègues de ma génération et celles et ceux qui me succèderont demain. La question n’est pas de savoir si mais quand et à quel prix s’opérera le changement. Même si la question paraît loin de nous dans l’immédiat, nous ne pouvons pas ne pas avouer que nous ne maîtrisons rien car nous ne comprenons pas ce changement. Mais il est bien là et nous sommes déjà pris dans son tourbillon. De nouveaux acteurs, de nouvelles règles s’imposeront. Notre identité professionnelle, aujourd’hui de plus en plus fragile, pourrait soit renouveler de visage, soit, pire encore, éclater avec pertes et fracas. Les pions sont déjà posés sur l’échéquier et chaque mouvement générera des vagues de conséquences qui auront de fortes répercussions sur la CPIC, notre rémunération pourrait se retrouver en jeu. Se posera certainement alors la question de savoir comment assurer l’alimentation constante et la stabilité de notre caisse…

Troisièmement, parce qu’il y a aussi de nombreux défis connus devant la profession. Je citerai la courbe démographique, les déficits des caisses sociales – miroir des soubresauts d’un monde peut-être devenu incontrôlable en raison des chavirements mondiaux politiques, économiques, juridiques, financiers, sociaux et technologiques. Selon les données actualisées sur les recensements de la population visant à calculer le coût de la vieillesse pour les systèmes de santé et sociaux dans le monde, citées le 5 mars 2019 lors de la conférence de neuroscience qui s’est tenue à Monaco, en 2050 plus de 20% de la population mondiale sera à la retraite. Notre caisse le ressent aujourd’hui, je vous laisse imaginer la suite.

Pour conclure ce chapitre responsabilité, faire partie du Conseil de Fondation de la CPIC serait pour moi un moyen d’assumer activement mes responsabilités : de bénéficiaire, de professionnelle, de collègue, de membre de la société en général.

Enfin, la responsabilité incite au partage.

Passionnée par notre métier et intellectuellement curieuse de tout, j’ai eu l’opportunité de démarrer ma carrière d’interprète de conférence dans le domaine des retraites et de la prévoyance. J’ai notamment travaillé d’abord pour le gouvernement québecois, ensuite, pour le gouvernement bulgare, dans le cadre des accords en matière de sécurité sociale entre la Bulgarie et les pays tiers, plus particulièrement le Québec, le Maroc etc…. Au fil du temps, les retraites sont devenues un sujet de prédilection qui m’a permis de développer des connaissances spécifiques et une certaine sensibilité dont je souhaite faire profiter la CPIC et ses bénéficiaires – VOUS, NOUS mes cher (ère)s collègues !

Chers /ères bénéficiaires,

Je souhaite partager mais j’appelle aussi au partage de votre part. Ce n’est qu’en renforçant nos avoirs que nous pourrons résister au cyclone des défis. Pour mieux illustrer mes propos, je citerai ici une grand-mère bulgare, à la tête, elle, de son « entreprise individuelle » – une petite ferme d’élevage de moutons, lorsque j’avais 6 ans. Me montrant sa « caisse » – le tiroir de sa table à manger, sous la toile cirée vétuste, dans lequel elle gardait soigneusement l’argent issu de la vente du lait de brebis, elle me dit : «Tu vois, ma fille, le tiroir est plein, mais il ne se remplit pas tout seul, il ne faut pas croire, c’est toi qui le remplit en travaillant. Il doit rester plein à tout moment. Si tu veux dépenser 10 EUR, il faut que tu mettes 30 EUR dans la caisse ! Toujours avoir le double du montant à dépenser dans ta caisse, comme ça, t’es tranquille! T’as compris ? ». Personnellement, j’ai bien compris le message et je verse régulièrement dans le pot commun de la CPIC sur mes fonds personnels. J’espère que vous avez à votre tour réussi à saisir l’essence de ce message. Il en va de notre prévoyance demain.

Pour finir, la singularité et la particularité de notre profession d’une part, et les bouleversements incessants de l’ordre mondial dans tous ses aspects, appellent à l’engagement commun pour préserver, notre Caisse – la CPIC, qui elle, reconnaissanons-le, a prouvé une stabilité infaillible à travers les époques, y compris en temps de crise, pour le bien de nous tous.

Soutenir ma candidature, c’est faire le choix d’une prévoyance responsable, pour un métier responsable.

Je vous remercie de votre attention.